Tenus à distance derrière une grille, le pied encerclé d’une couronne de métal, taillés et apprivoisés, les arbres des villes ont déjà, comme une revanche, préparé leur renaissance. Silencieusement, ils sont restés figés dans leur retraite hivernale, ignorés des passants eux-même pressés et inclinés, sombres et lestés d’anciennes promesses.
Pourtant, chacun a repoussé patiemment la frontière entre le jour et la nuit ; dans une très lente marée, la sève remonte et baigne le cœur des arbres. Même la mort a abdiqué, nauséeuse, engloutie, digérée par la poussée âcre et mielleuse.
Frémissements
Puis soudain, c’est l’explosion : les arbres reprennent leur territoire, ils arrachent au vide le souvenir de leur volume précis, ils s’imposent et s’élancent dans le ciel avec une exubérante délicatesse ! Un cri de victoire posé sur l’azur liquide. Les bourgeons allongent des doigts fébriles, c’est le signe que tous attendaient.
Alors les habitants des villes, enivrés et fiers, se redressent. Les corps marquent une pause, près à s’ouvrir aux émotions. Ils s’épanouissent et s’arrondissent ; pleins, dans un doux balancement, ils réinventent un rythme ancestral. Caressés de lueurs mentholées, les visages se lèvent. Les regards, vibrants de vertes fulgurances, se rencontrent à nouveau. La colère et la joie sont à nouveau nues.
Légère et fugace, une pluie d’or vif ruisselle sur les façades.
F.H