En suivant le canal Saint-Martin de la place Stalingrad jusqu’aux abords de la place de la République, on passe du 19ème au 10ème arrondissement et on entre de plain-pied dans ce qu’on appelle désormais le « boboland » parisien. Mais le Street Art n’a pas pour autant déserté ce quartier, naguère populaire comme Belleville et les alentours du parc de la Villette. Les cafés et restaurants ont fleuri le long du canal, accueillant toujours d’avantage de clients les week-end ; et les beaux jours, des grappes de djeunes très cool et plutôt bien lookés, s’agglutinent sur les quais, un gobelet de bière à la main, un fumigène dans l’autre, pour des apéros improvisés qui peuvent vous entraîner loin, à refaire le monde jusqu’au bout de la nuit…
Rêve, ivresses et échappées spirituelles nécessitent, cela va de soit, un décor urbain alternatif et arty. On trouve donc de nombreux micro-spots pour le Street Art dans ce quartier, à commencer par la Place Stalingrad, où encore récemment un bâtiment désaffecté au coin de la rue du faubourg Saint-Martin et du boulevard de la Chapelle, affichait fièrement un fameux collage de Shepard Fairey (Obey) : le portrait à l’étoile frontale ci-dessus, qui est resté en place pendant des années avant de partir avec la démolition récente de la vielle bâtisse d’angle. Puis à quelques pas, on arrive au Point Éphémère à côté de la caserne de pompiers sur les quais, nouveau port d’attache pour ceux et celle embarqués (et rescapés) de l’aventure de l’Hôpital éphémère dans le 18ème arrondissement, il y a déjà bien longtemps… Peintures murales, pochoirs et collages s’y succèdent et se recouvrent progressivement, on a pu ainsi y voir une fresque avec un minotaure de Zoo Project (voir Zoo Project, une nouvelle mythologie urbaine). Actuellement c’est un griffon griffé sur fond jaune qui est en train de se faire manger par des tags et autres interventions sauvages.
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En continuant en amont, on arrive aux écluses et aux ponts métalliques voutés, décor naturel du film Hôtel du Nord (1938) de Marcel Carné, avec Arletty, qui a grandement contribué au mythe populaire et gouailleux de ce quartier durant la première moitié du XXème siècle. Mais l’atmosphère y est désormais toute différente. Seule la façade de l’hôtel, classée, a été conservée tandis que l’intérieur a été entièrement remodelé pour laisser place à un rutilant, pseudo-rétro, très chic et très cher bar-restaurant du même nom. On peut y voir non loin un homme au chapeau de Nemo, des naufragés blancs de Jérôme Mesninger. En face, les cafés Chez Prune et La Marine accueillent les célébrités du quartier, comme Jacques Higelin avec lequel il est parfois possible de tailler une bavette en terrasse. Entre ces deux repères, une petite place publique triangulaire située entre Quai de Valmy et la rue Jean Poulmach avec un grand mur aveugle, est devenue un spot assez couru des artistes parisiens. Du changement régulièrement et des surprises graphiques, comme on peu le voir dans le diaporama ci-dessous.
Voilà, la visite s’arrête là pour Paris avec ce dernier diaporama, mais je vous propose ensuite d’embarquer pour un tour du monde atypique du Street Art, avec ce magnifique webdocumentaire produit par France Télévision, écrit par Sidonie Garnier, François Le Gall & Jeanne Thibord, et mis en forme par Greg Mignolini et Adrian Gandour : Défense d’afficher (8 artistes, 8 villes, 8 réalisateurs, ce que le street art raconte du monde) et dont voici le lien.
Bon voyage en poésie urbaine !
Florent Hugoniot