
Justine Frank, The Stained Portfolio, dessin et gouache sur papier, 33×38 cm, 1927-1928. Courtesy : Rosenfeld Gallery, Tel Aviv.
Cet énoncé intrigant est déjà tout un programme en soi… Maxime des Guerrillères, un livre de Monique Wittig, figure du mouvement de libération des femmes dans les années 70, c’est également le titre de l’exposition, belle et très stimulante, organisée par le collectif le peuple qui manque, et qui a lieu jusqu’au 13 avril 2013 au Centre d’art et de recherche bétonsalon. Cet espace culturel est un laboratoire artistique intégré dans les bâtiments de la faculté de Paris-8, à quelques mètres des tours de la BNF dans le 13e. Il fête ses 10 ans avec l’exposition « Fais un effort pour te souvenir. Ou, à défaut, invente. » qui visite d’une manière discursive le travail d’une dizaine d’artistes sur le deux thèmes : d’une part, le féminisme revu sous l’angle des gender studies – cette analyse étant très en vogue depuis 15/20 ans avec notamment la parution du livre Gender Trouble de Judith Buttler en 1990 ; et d’autre part la collecte, voire la fabrication des archives et leur réutilisation.
« Nous qui sommes sans passé, les femmes / Nous n’avons pas d’histoire (…) »
Premières paroles de l’hymne du Mouvement de Libération des Femmes.
Le néologisme de herstory, qui fut inventé par la poétesse américaine Robin Morgan en vue d’une relecture de l’histoire (history) sous son versant féminin, éclaire toute l’exposition. Celle-ci trouve sa source dans le grand courant artistique subversif et contestataire, apparu aux USA dans les années 70 avec les mouvements féministes et queer, dans la lignée philosophique de la French Theory, elle-même aiguillée par les écrits de Foucault et Deleuze. Se propageant par la suite en Europe, cette recherche sur le glissement et la transgression des genres motive désormais le travail de nombreux artistes dans le monde entier.

Pauline Boudry / Renate Lorenz, N.O Body, Installation film (16 mm. /DVD 15 min) et 47 photographies, 2008 – Courtesy: Ellen De Bruijne, Amsterdam et Marcelle Alix, Paris
Aliocha Imhoff et Kantuta Quiros, les deux initiateurs de cette manifestation artistique ont sélectionné une dizaine d’artistes : Gloria Anzaldúa / Pauline Boudry & Renate Lorenz / Giuseppe Campuzano / Theresa Hak Kyung Cha / Carola Dertnig / Cheryl Dunye / Renée Green / Marge Monko / Roee Rosen / Monique Wittig
Jubilation du travestissement et fou rire communicatif dans le film N.O Body de Pauline Boudry et Renate Lorenz, pas de deux troublant entre un artiste et sa créature avec Roee Rosen et Justine Frank… Pour ces belles surprises, et tant d’autre encore, je vous invite à aller voir cette exposition, et à lire cet excellent article « Invente toi toi-même » sur sur le site de MicroCassandre.
F.H.