En me balladant à Puebla, capitale de l’état de Puebla, Mexique, j’ai fait la découverte du marché populaire de Xonaca. Ce marché un peu endormi et à l’architecture très kitsh date des années 50, avec ses box carrés et ouverts qui se succèdent d’une manière surréaliste, tous peints dans des tons acides. Il est situé dans un quartier légèrement excentré du centre historique. Les efforts de rénovation de l’ancienne Puebla, très étendue, n’ont pas touché ce quartier populaire. Par contre la politique de préservation des richesses barroques et coloniales sont à l’échelle du désir des autorités municipales de faire de Puebla, située sur l’axe Mexico City / Veracruz au sud du pays, et classée au patrimoine mondial de l’Unesco, une des premières destinations du tourisme culturel au Mexique.
Ici dans la Colonia Xonaca, rien d’exubérant dans l’urbanisme : pas de beaux palacios ouvragés, les immeubles d’habitation sont très simples, les matériaux économiques. Il est aussi beaucoup plus récent, puisqu’il a été construit au milieu du XXème siècle. Mais les fresques sur le mur d’enceinte, colorées et joyeuses, et qui datent de 2011, ont immédiatement attiré mon regard. J’étais à ce moment-là en recherche intensive des réalisations du Colectivo Tomate, une association poblana à vocation artistique et sociale, créée par un groupe de jeunes architectes et décorateurs. C’est un ami qui m’avait conseillé d’en rencontrer les responsables et d’aller un peu fureter dans les quartiers populaires de la ville. J’entrepris une veritable enquête dans le quartier de Xananetla, quartier également défavorisé (lire Xanenetla ou l’art de la sublimation), pour ensuite me rendre d’une manière plus rapide et légère dans cet autre zone de la ville. Je n’avais jamais publié ces photos, c’est chose faite désormais.
En les sélectionnant, je m’étonne encore de la qualité du travail du Colectivo Tomate. Les enfants du quartier ont participé à la réalisation du long mural, qui se déploie sur tout le mur d’enceinte sud. Le style naïf s’est donc imposé, et les murales représentent une ville idéalisée dans ses activités quotidiennes, avec une touche mystico-catholique.
Pénétrant dans le petit marché de Xonaca, quelle ne fut pas ma surprise d’y trouver presque un copié-collé des images sorties tout droit de l’imaginaire enfantin : les commerçants y vaquaient à leurs occupation en cette calme matinée ensoleillée, certains me faisaient des sourires lorsque je faisait mine de les prendre en photo, se prétaient au jeu de la représentation et des apparences simples. J’ai ainsi pu suivre mon reportage avec une série de portraits que je suis heureux de vous présenter à la suite des murales, comme une illustration réelle et inversée du monde enchanté, la vision idéale des enfants du quartier de Xonaca.
Les regards s’allument, les comptoirs resplendissent, les pâtes de fruit brillent et dégagent un parfum irresistible. Avez-vous déjà essayé le fromage de chèvre frais poblano accompagné avec de la courge confite ? Un délice !! Car Puebla est, avec Oaxaca et Merida, une capitale gastronomique trés renommée au Mexique.
Souriez, vous êtes dans la boîte magique : le petit colibri va s’envoler vers les étoiles filantes. Una niñita ressemble à une Vierge de Guadalupe naine, à une poupée russe, tandis que les Rois Mages se pressent pour faire leurs emplètes avant de rejoindre Betléem. Un chien noir s’engage par la porte du marché, reniflant s’il n’y a pas quelques miettes de chicharon tombées au sol à nettoyer (longs morceaux de peau de porc frits dans l’huile bouillante, et dont les Mexicains sont friands).
Un beau souvenir que cette journée remplie de découvertes visuelles et gastronomiques, agrémentée de sourires échangés – à cette époque, mon espagnol plus qu’incertain ne me permettait pas d’engager de longues conversations. Mais parfois un simple regard en dit bien plus qu’un long discours…
Provecho (bon appétit), ouvrez vos mirettes et laissez parler votre coeur !
Florent Hugoniot – Zacatecas, le 04/10/2014